Un Après-midi de chien : Le brûlot de Sidney Lumet en Blu-ray

Sorti au cinéma il y a près de 40 ans, Un Après-midi de chien (1976) est édité pour la première fois en Blu-ray . Un évènement pour les inconditionnels de Sidney Lumet (12 hommes en colère), comme pour les mordus d’Al Pacino, dont la légende s’est écrite à travers le Parrain (1972), mais aussi grâce au rôle de désœuvré au grand cœur qu’il campe dans ce thriller social, emblématique de l’esprit contestataire des seventies. Sonny Wortzik, braqueur éternel, dont le seul tort aura été de vouloir croire en ses rêves, reste l’un des écorchés vifs les plus émouvants du Septième Art. Au sommet de son art, Pacino renoue avec le réalisateur de Serpico (1973) pour livrer un nouveau chef-d’œuvre dont le tandem a le secret. Immanquable.

Inspiré de faits réels

Avant d’être le film poignant que l’on connaît, Un Après-midi de chien a d’abord été initié par un fait divers . C’est en lisant le journal que Lumet prend connaissance du casse raté qui servira de socle à son intrigue. Bouleversé par le profil atypique des deux braqueurs amateurs, il se prend d’emblée de sympathie pour eux et décide de rendre hommage à leur geste désespéré en mettant en scène le fiasco de leur opération criminelle. Dans le rôle des deux acolytes malhabiles, on retrouve Al Pacino (Sonny) et son complice de longue date, John Cazale (Sal). Emporté par un cancer deux ans plus tard, le comédien fera une ultime apparition dans Voyage au bout de l’Enfer (1978) de Michael Cimino, qui sortira à titre posthume. Lui ayant donné la réplique dans les deux premiers volets du Parrain, Al Pacino partage une belle alchimie avec celui qui incarnait son frère Fredo, ce qui rend leur duo d’autant plus intense.

Faisant irruption dans la succursale d’une banque de Brooklyn, dans l’intention de la braquer, Sonny et Sal n’ont aucune idée du bourbier dans lequel ils viennent de mettre les pieds. La situation va de mal en pis quand ils découvrent, désabusés, que le coffre est quasiment vide et comprennent que les forces de l’ordre, qui encerclent le bâtiment, ne les laisseront jamais repartir libres. Rapidement, l’angoisse monte d’un cran et glisse peu à peu des otages vers les braqueurs eux-mêmes…

Ancré dans les enjeux des années 1970

Véritable plaidoyer pour la liberté de penser et d’agir, exacerbé par le contexte conflictuel de l’après-guerre du Vietnam, Un Après-midi de chien se fait l’écho de toute une génération . Cet aspect est particulièrement visible dans les scènes de rassemblement de foule. Les badauds, qui affluent dans un premier temps aux abords de la banque par curiosité, deviennent rapidement acteurs de la contestation, scandant des messages de soutien à l’attention des braqueurs et perturbant le travail de la police. Un contraste qui a conquis l’Académie des Oscars et valu au scénariste Frank Pierson d’être récompensé du prix du Meilleur scénario original. Au total, le film sera nommé six fois aux Oscars . Toujours labélisé 97% fresh sur Rotten Tomatoes , il n’a pas pris une ride.

« Au lieu de prévoir le grand ras-le-bol qui va soulever l'Amérique, Lumet force le spectateur à s'intéresser à eux, à leur naïveté, à leur bêtise, en identifiant le point de vue de celui-ci à celui des otages » (Les Cahiers du Cinéma)

Un film nécessaire

Décrit comme « ce qu'on appelle un classique du cinéma » par Score , Un Après-midi de chien a également été encensé par Positif , qui souligne en VO dans le texte : « Dog Day Afternoon est cette aventure proche du grandiose, elle est d'une folie qui n'est pas loin d'être shakespearienne », tandis que Le Monde renchérit en notant que « ce film est remarquablement agencé et mis en scène ». Même son de cloche chez France Soir , qui explique : « Si ce film est superbement réussi, c'est d'abord et peut-être surtout parce que le scénario (…) est d'une richesse d'invention stupéfiante », ainsi que Télérama , qui conclut : « Sidney Lumet nous apprend à nous méfier des stéréotypes et des idées toutes faites. Il nous apprend à regarder les autres, à ne pas leur plaquer un masque, à nous interroger sur eux… et à les aimer ».

Au-delà de la leçon de cinéma que livre cet expert du huis-clos, Un Après-midi de chien est aussi nécessaire d’un point de vue sociétal. Une puissance qui émane de l’histoire comme de la réalisation et qui atteint son paroxysme grâce au jeu épuré et percutant de Pacino et Cazale, désarmants de sensibilité en duo de braqueurs amateurs pris à leur propre piège.

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